Phobie scolaire : quand l'erreur de diagnostic a des conséquences dramatiques

Phobie scolaire : pourquoi pathologiser est une erreur aux lourdes conséquences

Et si ce n'était pas les jeunes qu'il fallait soigner ?

De plus en plus d’adolescents ne parviennent plus à aller à l’école. Pas par opposition. Pas par paresse. Pas par caprice. Mais parce qu’ils en sont littéralement incapables.

Leur système nerveux a tiré le frein d’urgence. Ils vivent un syndrome de figement, un épuisement profond, une incapacité physiologique à se réadapter à un environnement devenu, pour eux, dangereux ou insupportable.

On parle alors de phobie scolaire, mais ce terme, pourtant largement utilisé, masque souvent une réalité bien différente.
Il cache ce qui s’apparente en réalité à un burnout atypique, très fréquent chez les jeunes autistes, TDAH, hypersensibles ou à haut potentiel.

Trop souvent, cette réalité est mal comprise, mal interprétée et surtout mal prise en charge. On cherche à poser un diagnostic, on soupçonne une dépression, on parle de troubles anxieux, on prescrit des médicaments.


Autrement dit, on pathologise, ce qui est, au départ, un signal d’alarme sain du système nerveux.
on aggrave la souffrance du jeune au lieu de l'apaiser.

 

Commençons par définir le verbe "pathologiser"

Pathologiser 
Attribuer un caractère pathologique à certaines conduites
(Conseil international de la langue française, 1976)

 

Pathologiser la phobie scolaire, c'est considérer injustement ou à tort que c'est le jeune qui a un problème, en particulier un problème médical.
C'est rendre l'ado responsable de la situation dans laquelle il se trouve, au lieu de considérer que c'est le système dans lequel il évolue qui en est la cause.

 

C'est vrai pour toutes sortes de difficultés de santé mentale : les victimes de suicide sont forcément "malades" mentalement, on ne remet jamais en cause son environnement. C'est aussi vrai pour les burnouts professionnels, pour tous les types de harcèlement (moral, scolaire, sexuel, etc.) :
On pathologise la victime sans chercher, en amont, à modifier un tant soit peu son environnement.

 

Parler de trouble anxieux cupabilise l'adolescent et invisibilise sa réalité

Qualifier la phobie scolaire de trouble anxieux, c'est faire porter la responsabilité de sa souffrance au jeune. C'est renvoyer l'ado à une défaillance supposée de son fonctionnement émotionnel.
On lui fait comprendre, parfois très clairement, parfois à demi-mot, que le problème vient de lui. Il entend des choses comme :

  • "Tu es trop stressé"
  • "Tu dois apprendre à gérer ton angoisse"
  • "Tu dramatises"
  • "Le problème est dans ta tête"

Mais ce n'est pas un excès d'angoisse ou un simple stress scolaire. Ce que vit l'ado relève souvent d'un état de figement neurologique.
C'est une réaction physiologique involontaire de son corps qui dit : "Je ne peux plus. j'ai tout donné. Je dois me protéger."

 

C'est une réponse de survie, une sorte de mode de sécurité activé par le système nerveux autonome quand il est saturé ou en détresse chronique.

 

Pourtant, en psychiatrie classique, cela passe pour un "trouble" à soigner. En réalité c'est une réponse adaptative du système nerveux, selon la théorie polyvagale (Stephen Porges).
Or, en renvoyant le jeune à sa supposée "faiblesse", on ajoute à la souffrance, déjà très présente, une couche de honte et de culpabilité, ce qui aggrave l'état de figement et d'impuissance.

Une erreur d'analyse qui masque souvent un trouble neurodéveloppemental

Dans un très grand nombre de cas, les adolescents en phobie scolaire que je rencontre sont en réalité neuroatypiques.

Derrière ce retrait massif de l'école se cache un trouble du neurodéveloppement : TSA, TDAH, HPI, DYSpassé inaperçu ou que personne n'a pris au sérieux.

Ces profils ont des seuils de tolérance à la surcharge sensorielle, sociale, cognitive ou émotionnelle bien différents que ceux des neurotypiques.

 

Lorsqu'on applique sur eux une grille purement anxieuse ou psychiatrisante, on rate le diagnostic de fond :

  • on leur donne des anxiolytiques alors que le cerveau est en burnout
  • on les force à s'exposer alors que leur système nerveux est en shutdown (repli)
  • on cherche des causes familiales ou affectives là où il y a une surcharge neurologique et environnementale

Cette errance diagnostique est l'un des drames de la phobie scolaire : on perd des années à chercher ce qui ne va pas chez l'ado alors qu'il suffirait d'identifier un TND masqué et d'adapter l'environnement pour soulager sa détresse.

Des traitements standardisés, inadaptés aux réels besoins du jeune

Quand on considère la phobie scolaire comme un trouble anxieux, on propose souvent :

  • des thérapies cognitivo-comportementales (TCC)
  • des expositions progressives à l'école
  • des techniques de gestion du stress

Toutefois, ces approches partent du principe que le problème est lié à une peur excessive ou irrationnelle du jeune ou à une mauvaise régulation émotionnelle.

 

Or, dans le cas du burnout atypique, ou d'un TSA non diagnostiqué, l'école est objectivement invivable :

  • trop de bruit, trop de sollicitations, trop de codes sociaux implicites
  • trop de pression, trop d'injustice, trop de fatigue mentale
  • pas assez de repos, pas assez de sécurité, pas assez de sens

L'adolescent ne peut pas y retourner tant qu'il n'est pas "réparé", tant que son environnement n'est pas apaisé, tant qu'on ne respecte pas son seuil de tolérance, tant qu'il n'est pas sécurisé.

 

Le forcer à retourner à l'école trop vite, sous prétexte de "lutter contre l’évitement", c’est prendre un risque : celui de provoquer un effondrement plus grave, un isolement profond, voire, dans certains cas, un passage à l’acte désespéré.

Les dangers de la pathologisation : enfermer au lieu de comprendre

Quand on colle une étiquette médicale, pathologique, sur un adolescent, on risque de l'enfermer dans une identité de "malade" ou de "faible".  Il devient "le phobique", le "dépressif", "celui qui ne va jamais bien".

On lui vole une partie de son pouvoir d'action, de sa compréhension de lui-même. On l'éloigne de ses ressources personnelles, de sa capacité à se reconstruire. On lui fait croire qu'il est "cassé".

 

Mais surtout, on oublie que sa réaction est logique et saine, dans un contexte toxique ou mal ajusté à ses besoins neurologiques.
On occulte la dimension environnementale de sa souffrance.

 

Et si, au lieu de tenter de "réparer" l'ado, on se demandait plutôt :

  • qu'est-ce que l'école ne voit pas ?
  • qu'est-ce que ce jeune essaie de dire à travers la souffrance de son corps, son silence, son retrait ?
  • et si son burnout nous criait quelque chose sur la violence ordinaire du système éducatif ?

Derrière chaque adolescent figé, silencieux, isolé, il y a un appel à changer de regard, à repenser la norme, la performance, la façon dont on exige l'adaptation à tout prix.

Ne pathologisons pas ce qui est un signal d'alarme sain

La phobie scolaire n'est pas une maladie. C'est une alarme vitale, un cri du corps, une tentative désespérée de protection du système nerveux pour dire "Je ne peux plus survivre là où je suis " ; c'est un "stop" salutaire, une demande de changement.

 

Plutôt que d'enfermer (et culpabiliser)  ces jeunes dans des diagnostics d'anxiété, écoutons-les.

Cherchons la cause réelle de leur effondrement neurologique, sensoriels et sociaux.

Offrons-leur un espace de reconstruction respectueux , doux, sécurisant  et individualisé.

Vous êtes parent ou professionnel et vous souhaitez comprendre en profondeur ce que vit votre jeune en phobie scolaire ?

Je propose un diagnostic express, suivi d'un plan d'accompagnement personnalisé, pour :

  • identifier un éventuel burnout atypique ou TND masqué
  • repérer les déclencheurs sensoriels, cognitifs et émotionnels
  • élaborer des pistes concrètes de réadaptation à court, moyen et long terme et de réintégration.

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