« Ce n'est pas grave. » Non, il ne va pas rater sa vie
La phobie scolaire fait peur à tout le monde.
Cela peut se comprendre, car comment ne pas se sentir démuni et effrayé face à un adolescent qui n’arrive plus à aller à l'école, au collège ou au lycée, qui pleure, qui panique face à chaque demande ou qui reste prostré à la maison ?
Tout le système qui entoure l'enfant est en état d' alerte :
- En premier lieu les parents qui ne comprennent pas ce qui se passe et ne savent pas comment aider leur ado ;
- Les enseignants, ensuite, qui déploient le peu de moyens à leur disposition pour que le jeune puisse rester à l'école ;
- Les professionnels de santé (physique et mentale), enfin, qui s’échinent à régler le « trouble anxieux » du jeune dans le but de le ramener coûte que coûte et le plus rapidement possible sur les bancs de l'école.
Et si, au contraire, on considérait cette rupture scolaire comme une invitation à écouter ce que l’école ne veut ou ne peut plus entendre et ne sait ou ne peut pas régler ?
Et si on n'envisageait pas la phobie scolaire comme une catastrophe, mais plutôt comme une superbe chance de commencer autre chose, de faire autrement ?
Une crise peut devenir un levier
On considère la plupart du temps la phobie scolaire comme un aveu d'échec.
Néanmoins, elle peut, lorsqu’elle est bien accompagnée, devenir un formidable levier de connaissance de soi, une belle opportunité d’explorer ses ressources personnelles, d'identifier les raisons de son épuisement et les sources de son effondrement.
Beaucoup d’adolescents que j'ai accompagnés m'ont dit quelque chose qui, avec le recul, est fondamental :
« Heureusement que j'ai été en phobie scolaire. Sinon, je me serais perdu. »
Eh oui, derrière le symptôme ( l’impossibilité d’aller à l’école) se cache un cri du corps et du cœur.
Ce signal d'alarme invite à ralentir, à écouter, à comprendre ce qui, dans l’environnement du jeune, est devenu insupportable.
La phobie scolaire est souvent la conséquence d’un trop-plein :
- Trop d’efforts,
- Trop de suradaptation,
- Trop d’attentes,
- Trop de bruit,
- Trop de jugements.
Elle survient souvent chez des jeunes hypersensibles, TDAH, autistes, HPI, dys… qui ont tout donné pour tenir le coup dans un cadre qui ne leur correspondait pas.
Quand ce cadre devient trop étriqué, le corps dit "halte, arrête tout !".
Le piège de la productivité : quand on oublie l’humain
Dans notre société, tout est organisé autour de la performance, qu'elle soit personnelle, professionnelle, scolaire, familiale…
Dès le plus jeune âge, votre ado a appris qu'il devait « faire des efforts », « lutter », « s’accrocher ».
On félicite toujours la résistance, pas la juste lucidité.
Le résultat ? Quand un adolescent s’écroule, on s'échine à résoudre un problème, alors qu'il s'agit du symptôme d’un système malade.
Beaucoup de parents sous pression me disent :
« Je sais qu’il souffre, mais il faut bien qu’il continue, non ? Sinon il va rater sa vie. »
Eh bien non, il ne va pas rater sa vie, bien sûr que non.
Ce qu’il risque surtout, c’est que sa santé se détériore, comme sa confiance et son estime de soi, qu'il perde tout désir de vivre en essayant de se soumettre à un modèle qui le broie.
L’école est importante, oui, mais la vie l’est bien plus.
Un adolescent qui ne va pas bien n’a pas besoin de cours, de devoirs supplémentaires, mais de plus de douceur, d’écoute et de sens.
L’urgence n’est pas scolaire, elle est humaine
Quand un jeune est en phobie scolaire, l’urgence n’est jamais académique.
L’urgence est dans le soin, dans le bien-être psychique et physique et la reconnexion à la sécurité intérieure.
Avant même de penser aux cours à rattraper, l'urgence est de comprendre :
- Pourquoi son système nerveux s’est mis en alerte permanente
- Pourquoi l’idée d’aller à l’école provoque une panique viscérale.
- Pourquoi il n’arrive plus à sortir du lit sans pleurer, ou à se concentrer sans trembler.
La phobie scolaire n’est pas un caprice, mais un un mécanisme de survie.
Le rôle de parent n’est pas de forcer à tout prix son enfant à retourner à l'école , mais d'accompagner le processus vers la sécurité.
C’est en cela que l’approche que je défends est radicalement différente de la prise en charge de l'anxiété et du "fais un effort".
Forcer un enfant à retourner à l’école trop tôt, c’est le couper encore plus de lui-même, c’est risquer d’aggraver sa panique, d’installer la honte et, parfois, d’ouvrir la porte à des pensées suicidaires.
La phobie scolaire c'est un appel à retrouver du sens
La phobie scolaire n’est pas une "maladie" isolée, c’est le symptôme d’un système collectif qui demande aux jeunes d’être performants avant d’être vivants.
Elle met en lumière un conflit intérieur :
« Dois-je continuer à me trahir pour être conforme, ou est-ce que je pourrais enfin écouter mes besoins, même si le monde n'a pas les moyens pour les accueillir ? »
Beaucoup d’adolescents en phobie scolaire sont des esprits profonds, curieux, lucides, sensibles et informés.
Ils ne rejettent pas le savoir, mais la forme du savoir, la manière dont il est imposé, hiérarchisé, dénué de sens dans un monde hyperconnecté qui change à chaque instant.
Ce que les jeunes demandent, c’est de retrouver une cohérence intérieure :
- Apprendre est important, oui, mais pas au prix de leur santé mentale ;
- S’intégrer, oui, mais sans se laisser dissoudre dans un portrait qui n'est pas le leur ;
- Avancer oui, mais dans une direction qui leur correspond.
Pour les parents, c'est apprendre à lâcher la peur du “ratage”
Si votre enfant ne va plus à l’école aujourd’hui, ce n’est pas grave.
C'est vrai qu'il traverse une tempête.
C'est vrai que c’est difficile, inquiétant, parfois épuisant.
Il ne va pas rater sa vie pour autant.
Il n'est pas en train d'échouer dans ses apprentissages, il fait une pause vitale.
Dans un monde qui glorifie la productivité, la performance et l'agressivité, apprendre à se connaître et se respecter est une compétence rare et précieuse.
Votre adolescent est peut-être en train de construire les fondations d’une vie plus lucide, plus juste, plus alignée.
Votre rôle, en tant que parent, n’est pas de le pousser à devenir le jeune utile à la société, mais de le protéger de la pression extérieure pour lui permettre de se reconstruire à son rythme.
Vous pouvez l’aider en :
- Nommant son ressenti sans jugement (« je vois que c’est trop difficile pour toi aujourd’hui ») ;
- Valorisant son courage d’écouter ce qu’il ressent ;
- Priorisant son bien-être plutôt que les notes ou les absences ;
- Vous informant sur la phobie scolaire, pour mieux comprendre ce qui se joue au-delà des apparences..
Parents, vous pouvez reprendre confiance dans votre rôle et mettre votre enfant en sécurité, malgré tous les messages et pressions que vous subissez.
Moi ou d'autres personnes formées à cette prise en charge particulière sommes là pour vous y aider.
Collectivement, c'est repenser la réussite
Nous avons collectivement besoin de redéfinir ce qu’est la réussite.
Un jeune qui a fait une pause scolaire et qui, plus tard, trouve un métier en accord avec ses valeurs n’a rien raté.
Il a, au contraire, gagné en conscience.
De nombreux adultes atypiques me confient avoir, eux aussi, vécu un effondrement à l’adolescence, souvent qualifié de “phobie scolaire” ou de “dépression”.
Ils me confirment à quel point cette période, bien que douloureuse, a changé leur vie.
Elle leur a permis de comprendre leurs besoins, leurs limites, leur rythme, de sortir de la suradaptation, de se choisir en priorité.
Alors non, la phobie scolaire n'est pas une condamnation à une vie ratée :
- Elle éclaire.
- Elle transforme.
- Elle montre ce qui ne fonctionne plus
La phobie scolaire ouvre la voie à ce qui a du sens.
Après la crise, on fait quoi ?
Une fois que l’urgence est apaisée, que le jeune retrouve un peu de sécurité intérieure, vient le temps de la reconstruction.
Attention, ce n'est pas forcément le retour à l’école qu'il faut envisager, mais plutôt privilégier un cheminement progressif :
- Un suivi avec un professionnel formé à la phobie scolaire et aux profils atypiques ;
- Des explorations douces (cours en ligne, projets personnels, bénévolat, thérapies créatives) ;
- Surtout, le respect absolu de son rythme.
Chaque parcours est unique.
Toutefois, tous les parcours ont un point commun :
Le retour à la sécurité précède toujours le retour à l’école.
Ressources pour les parents
- Pour vous aider à mieux comprendre ce que vit votre enfant, j’ai créé un guide gratuit “Phobie scolaire : comprendre pour agir sans nuire”, à télécharger ici :👉 Télécharger le guide gratuit
- Pour aller encore plus loin dans la compréhension et les outils à votre disposition,
journée de formation du 8 novembre 2025 :
"Phobie scolaire : une journée pour comprendre et agir autrement "

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